Nîmes
Environnement
Par D'Harlingue Julie
Publié le 19/10/2020 à 18:25

Dossier : Les chasseurs ont-ils moins de droits ?

À la mi-septembre, un rassemblement de chasseurs a eu lieu à Prades (66) pour défendre les valeurs de la chasse "traditionnelle". Ils étaient plus de 1 000 à s'être retrouvés dans le fief du Premier ministre Jean Castex à l'appel du président national de la Fédération de la chasse. Un rassemblement pour dénoncer "l'écologie punitive" dont ils seraient victimes. Les chasseurs dénoncent l'interdiction de la chasse à la glue. Cette pratique qui consiste à piéger les oiseaux sur un arbre à l’aide d’une colle, pour ensuite en attirer d’autres était encore autorisée dans 5 départements de la région Paca. Les seules en Europe. Au début du mois de septembre, Emmanuel Macron le président de la République l'a suspendue pour un an. Faut-il comprendre par là que les chasseurs auront moins de droit à l’avenir ? Éléments de réponse dans ce dossier où viàOccitanie a suivi le quotidien d'un chasseur. 


À Saint-Siffret, comme dans de nombreux territoires français, on commence à partir en quête du sanglier très tôt. La commune gardoise dispose de 800 hectares où l’on peut chasser, dont 50% en plaine. 

Ce samedi matin, une battue aux sangliers était organisée sur les 100 hectares de bois aux chênes verts et de plaine aux vignes gorgées de soleil. 6h30, les chiens sont prêts, et chacun connaît son poste. Didier est chef de battue. Il dirige 3 piqueurs et 14 postés. Bilan au bout de deux heures. 4 sangliers tués dans ce secteur, là où il y avait 500 nuisibles il y a 30 ans ... et plus de 40 000 aujourd'hui.

Les chasseurs seraient donc essentiels pour  "rééquilibrer la nature". Fusil en main, on "regarde et on analyse avant de faire n’importe quoi "; c’est la règle que rappellent certains « anciens ». Ce samedi matin, Didier n’a par exemple point tiré sur les petits sangliers qui suivaient la horde des plus gros porcs sauvages… Avant le début de la battue, tout est encadré et pensé en amont, avec une carte où chaque chasseur doit respecter son emplacement, en respectant la règle du tir à 30 degrés d’orientation.


Pourtant, il ne fait pas bon être chasseur au XXIe siècle, d'après Didier, le chef de la battue. "L'activité est décriée par ceux qui se disent écologistes et qui prétendent connaître la nature mieux que quiconque". Pis même, elle serait menacée. Les chasseurs de Saint-Siffret observent souvent des dégradations de leur mirador, où seraient même agressés physiquement. 

L’association anti-chasse Aspas, rétorque. "Oui il y a bien une surpopulation des sangliers… mais c’est à cause du chasseur lui même" ! " Depuis des années, on se rend compte que c'est l'activité de la chasse qui entretient cette surpopulation de sangliers, en faisant ou en apportant artificiellement de la nourriture aux sangliers, en les abreuvant l'été,...", relève Christian Perrenot, adhérent de l’Association pour la protection des animaux, délégué dans l’Hérault. L'association pour la protection des animaux sauvages, qui a mené de nombreuses enquêtes, observe qu'entre les années 70 et 90, "les chasseurs ont financé de grands élevages de sangliers pour en faire de futurs trophées". 

 

Des chasseurs de moins en moins nombreux en Occitanie 

 

S’il est aujourd’hui plus difficile de renouveler les générations de chasseurs, beaucoup de jeunes sont tout de même attirés, notamment à travers les réseaux sociaux et certaines vidéos spectaculaires de Youtube où l’on voit des sangliers pesant plus de 150 kilos, … Le Gard, qui compte plus de 600 sociétés de chasse et près de 15.000 adhérents, fait partie des départements particulièrement actifs en la matière. Un territoire où l’on ne pratique ni chasse à la glu, ni chasse à courre, mais où on observe avec inquiétude les décisions qui pourraient menacer ces pratiques. En effet, une interdiction totale de la chasse à la glu serait synonyme à terme de l’impossibilité d’élever des oiseaux appelants. De la même, l’interdiction de la chasse à courre signifierait la disparition des « chiens courant » donc l’abolition à terme des chasseurs traditionnels accompagnés de leurs chiens. 


Alors que répond l'état face à cette menace ? Le préfet du Gard, Didier Lauga est venu au chevet des chasseurs ce jeudi 2 octobre. Le 27 juin dernier disparaissait brutalement à l’âge de 58 ans Alain Martel, responsable du service des Agents de développement de la Fédération départementale des Chasseurs du Gard. Une cheville ouvrière de cette entité auquel la Fédération gardoise a rendu hommage ce jeudi matin avec le dévoilement d’une plaque officielle  à son nom baptisant l’une des salles de l’Ecole de Chasse et de la Nature de Nîmes, en présence du préfet du Gard, Didier Lauga. Une présence « symbolique » aux dires mêmes du représentant de l’Etat dans le Gard, mais qui a tenu à réaffirmer son soutien aux chasseurs.


Régulièrement pris pour cibles par des militants écologistes, les chasseurs font l’objet d’attaques répétées. À quelques mètres du siège de la Fédération départementale de Chasse du Gard, un panneau publicitaire a été vandalisé et tagué par l’inscription « Mort aux Chasseurs », ne laissant que peu de doute quant aux aspirations profondes de l’auteur des faits. Aux yeux du préfet, l’action des chasseurs est "indispensable à la régulation de la faune afin d’éviter sa prolifération", comme c’est le cas dans le Gard face à la problématique des hordes sangliers.


Pour Didier Lauga, le soutien de l’Etat va au-delà "du maintien d’une tradition enracinée dans l’Histoire de France. Aujourd’hui ceux qui s’attaquent aux chasseurs s’attaquent en réalité à la nature" a-t-il rappelé lors de l’acte officiel de dévoilement de la plaque. Plusieurs documents historiques - permis de chasse, autorisations royales, préfectorales, etc. - datant de plusieurs siècles ont été présentés au préfet du Gard afin de témoigner de l’enracinement de la culture de la chasse dans l’ADN de la société française et de ses territoires.


Dans le Gard, il y aujourd’hui 13 258 adhérents contre 21 735 en 2020. La tendance est aussi à la baisse sur le plan régional.