Prades
Société
Par D'Harlingue Julie
Publié le 10/06/2021 à 14:00

Dossier : Nos langues régionales sont-elles en péril ?

Entre la Nouvelle-Aquitaine et l’Occitanie, vous êtes 542.000 locuteurs occitans, 140.000 à parler le Catalan. Nos langues régionales font donc partie de notre ADN. Et pourtant, la loi Molac valorisant les langues régionales, promulguée le mois dernier par le Conseil constitutionnel, ne comprend plus l’enseignement immersif.

Alors comment en sommes-nous arrivés là ? Quel serait l’avenir de nos bressolas et calendretas?  Nombreux en Occitanie livrent un combat pour que nos langues ne meurent pas à petit feu. Dossier. 


Ils étaient une centaine samedi 29 mai, sur la place du Capitole à Toulouse, à protester. De nombreuses mobilisations ont eu lieu en Occitanie, terre catalane et occitane, pour soutenir l’apprentissage immersif des langues régionales. 

Cette mobilisation est la conséquence d’un conte rocambolesque. Voici l’histoire d’un texte de loi sur les langues, qui a fourché. La loi Molac examinée au Parlement jusqu’en mai dernier avait pourtant  vocation à conforter l’enseignement bilingue au sein de l’Education nationale, et donc fédérer toute une société… Mais elle a fini par la crisper.

Revenons en arrière. Avril 2021, le parlement adopte dans son intégralité le texte visant à promouvoir et protéger les langues régionales. Et puis coup de théâtre : une soixantaine de députés de la majorité saisit le Conseil constitutionnel. Les parlementaires veulent retoquer un article concernant l’attribution de forfait pour des écoles immersives. C’est-à-dire le fait que les communes puissent contribuer financièrement aux frais de scolarité des familles souhaitant inscrire leur enfant dans les écoles où toutes les matières sont enseignées en langue régionale. Finalement les membres du Conseil constitutionnel ont affirmé la constitutionnalité de cet article. 

Par contre, en se penchant sur cette loi, ils ont retoqué un article sur l’immersion des langues régionales en invoquant l’article 2 de la Constitution indiquant que la langue de la nation est le français…  et aucune autre langue.

Le texte est finalement promulgué par le Conseil constitutionnel le 21 mai dernier, censuré partiellement.


Conséquence directe : bressolas et calendretas, écoles immersives d'Occitanie, pourraient ne plus exister. Il y en a 8 en Catalogne. Sous contrat avec l'Education nationale, tous les enfants suivent les mêmes programmes que des élèves en école "classique". Seul changement, ici tous les cours sont donnés en Catalan. Une volonté de préserver la culture et les traditions très ancrées ici. Chaque jour les enfants ont 1h30 de cours de français.

Avec son enseignement en immersion, la Bressola est directement concernée par les dernières annonces gouvernementales. Un choc pour cet établissement qui a fait ses preuves depuis plus de 40 ans : 100% de réussite au brevet, les enfants sont bilingues, tous s'intègrent parfaitement dans les études (lycée et supérieur)... Une incompréhension pour les parents qui saluent la pédagogie et l'enseignement apportés à leurs enfants.


Et c'est sur le fief du Premier ministre Jean Castex que l'on nous a donné rendez-vous. Lequel alors maire de la ville de Prades avait défendu et aidé cette école à se développer. Jean-Sébastien Haydn président aussi du réseau Eskolim devrait être reçu prochainement par Jean Castex afin de trouver une solution, pour que tout un patrimoine ne disparaisse pas du jour au lendemain.


Carole Delga, la garante de la protection de nos langues sur le territoire d’Occitanie s’est aussi offusquée de cette décision… Elle affirme sa combattivité.


De son côté, le président de la République a apporté son soutien aux écoles immersives à travers les réseaux sociaux. Le Premier ministre et le ministre de l’Education nationale rencontreront dans quelques semaines deux parlementaires missionnés pour évaluer les mesures à prendre….  Le député de l’Hérault, Christophe Euzet, avec son homologue des Côtes d’Armor doivent rendre un rapport avant la mi-juillet.

Alors que deviendront les calendretas et les bressolas d’Occitanie ? Toutes les personnes interrogées dans ce dossier l’assurent : elles ne laisseront jamais ces écoles disparaître.