Moissac
Culture
Par Marilyn Beaufour
Publié le 04/06/2019 à 12:12

Festival des Voix à Moissac : Fatoumata Diawara, la musique en partage

Fatoumata Diawara poursuit ses rendez-vous scéniques avec, Fenfo, son 2e album solo après sa collaboration vivifiante avec M-Mathieu Chedid pour Lamomali. Elle est en concert au Festival des Voix de Moissac, le 14 juin prochain. La diva malienne, à travers ses chansons, défend la cause des femmes, des migrants et de l’Afrique. Rencontre.

Votre musique incarne un combat pour des causes comme celles des migrants, des femmes africaines, de l’esclavage. Qu’est-ce qui dans votre vie, vous a amenée à cette conscience de l’autre, de sa souffrance ?

Cela vient de mon enfance, de ma vie de combattante. J’ai dû lutter pour tout avoir. Nous devons partager, dire : c’est possible. Mon chant est celui de la profondeur car je raconte mes expériences vécues. Si grâce à ma force, sur mille personnes que j’ai croisées, cinquante s’en sortent, ça me rend heureuse. Je lis dans les commentaires après mes concerts que cette lutte s’avère juste, qu’il faut oser être soi.


Quel rôle peut jouer la musique pour défendre ses causes ?

Le blues est né de la douleur qui lui-même a donné naissance à toutes sortes de musiques, au jazz, au rock… Si d’autres filles que moi ont vécu des choses proches des miennes, elles ressentent ma vérité. D’une autre culture, d’une autre couleur, peu importe, il y a un moment où l’on se rejoint.


Vos racines maliennes sont omniprésentes, notamment via la langue, le bambara, et les instruments de musique ancestraux du pays. Qu’est-ce qui est important dans cet héritage ? Et de son mélange avec d’autres sonorités ?

Nous avons au Mali une culture particulière. Les Maliens collaborent aisément avec des artistes de pays très divers, les pays anglophones, du nord de l’Europe, Björk notamment. Nous avons beaucoup de demandes. Si nous changeons, nous perdons notre forte identité. Or, nous devons rester des ambassadeurs, un peu comme la musique hindoue avec le sitar. Mon style est issu de la musique traditionnelle malienne, du blues malien mêlé aux sons de la guitare et du piano. Et j’ai choisi de chanter en bambara, non en anglais ni en français, car j’éprouve un besoin de représentation. Mais notre musique se partage. Je vis en France depuis longtemps et la nourris de toutes les collaborations que j’expérimente. Par exemple Herbie Hancok a beaucoup influencé mes compositions.

 

 

 

Vous êtes un espoir pour l’Afrique, représentante rare de femmes musiciennes, à la fois acceptée en Afrique et reconnue dans le monde entier. Quel est votre ressenti ?

Il y a un véritable besoin. J’essaie à ma mesure d’être un espoir. Il existe de grandes dames de la musique africaine, Angélique Kidjo, Miriam Makeba… Des jeunes filles doivent prendre le relais et devenir des Mamas Africa à leur tour. Je ressens beaucoup d’émotion quand je vois des personnes pleurer pendant mes concerts. Les femmes africaines perdent leurs codes en me voyant. «Quoi, une femme africaine musicienne, avec une guitare électrique ! Si elle a réussi, alors moi aussi je le peux !». Les enfants, les adolescentes viennent me voir, ça dépasse largement l’Afrique. Et cela me touche énormément d’élargir cet espoir au monde entier.

En concert le 14 juin à 19h30, au Festival des Voix de Moissac. Place de l'église Saint Georges à La Française (82), avec Ça Va Valser+ Eric Fraj et Morgan Astruc. De 22€ à 25€, 12€ - de 12ans. www.moissac-culture.fr

Autres dates : le 15 juin à Toulouse, le 11 juillet à Arles.