Antonia Alby, Manuel Darrac, Maurice Dubois... Ils sont 3.900 à avoir leur nom gravé sur le mur des Justes, au mémorial de la Shoah à Paris. Derrière chacun de ces noms, des héros qui sauvèrent des juifs durant la Seconde Guerre mondiale au péril de leur vie. Parmi eux, celui de Lucie Février-Pascal. Née en 1911 dans l’Hérault. Son fils, Georges Pascal, à la fois témoin et résistant se remémore cette histoire. C’est pour lui un bond de 76 ans dans le passé. Il n’avait alors que 12 ans. Il garde un œil admiratif et affectueux sur sa mère. Rencontre
Native de Montpellier, Lucie Février tient une bijouterie à Ganges, pendant la Seconde Guerre mondiale. Elle accueille et exfiltre des centaines d’enfants juifs vers l’Espagne, puis l’Amérique du Sud, à l’aide du réseau Julien, qu’elle a créé et dont le siège se trouve sur les hauteurs de Ganges (Hérault), dans un chalet familial. En 1947, elle participe également avec sa famille et Eleanor Roosevelt à l’opération secrète du bateau Exodus qui, le 10 juillet part du port héraultais de Sète avec 4.530 juifs rescapés des camps de la mort, pour se diriger vers la Palestine, alors sous mandat britannique. L’objectif ? Le grand retour en terre sainte.
Des parents "Justes parmi les Nations"
En 1994, avec son mari Georges Pascal, résistant lui aussi, ils ont été désignés "Justes parmi les Nations" pour avoir aidé une famille Luxembourgeoise. M. Nussbaum et son épouse, qui était catholique, avaient un petit garçon, Gustav. Vivant au Luxembourg, la famille s'enfuit en France lors de l'invasion allemande et se réfugie chez Georges et Lucie Pascal qui avaient deux fils à peu près de l'âge de Gustav. Accueillis chaleureusement, les "visiteurs venus du Luxembourg furent installés dans une cabane de vigneron isolée au milieu de son vignoble et inaccessible par la route. Les Nussbaum y vécurent jusqu'à la libération de la France en août 1944. Personne au village ne connaissait leur présence. Les Pascal gardèrent le secret pendant quatre ans et veillèrent à tous leurs besoins. Au début, Gustav, qui ne parlait que l'allemand, eut du mal à communiquer avec les petits Pascal mais tous trois devinrent rapidement amis. Mme Pascal comblait ses hôtes de cadeaux pour les fêtes. Les deux familles restèrent en relations après la guerre et les enfants continuèrent à se voir après la mort de leurs parents.
Parce qu’ils incarnent le meilleur de l'humanité et qu’ils considéraient n'avoir rien fait d'autre que leur devoir d'homme, le 16 août 1994, l'Institut Yad Vashem de Jérusalem a décerné à Georges et Lucie Pascal le titre de «Juste parmi les Nations».
Les personnes reconnues « Justes parmi les Nations » reçoivent de Yad Vashem un diplôme d'honneur ainsi qu'une médaille sur laquelle est gravée cette phrase du Talmud : « Quiconque sauve une vie sauve l'univers tout entier ». Il s’agit de la plus haute distinction civile de l’état d’Israël. Au 1er janvier 2020, le titre avait été décerné à 27.712 personnes à travers le monde, dont 4.130 en France.
Lucie Pascal s’éteindra en 1968. Pour ses actes héroïques, la ville de Montpellier baptisera, 50 ans plus tard, en mai 2018, une allée à son nom.